Si l’on parle de l’origine, d’où provient votre envie de devenir architecte ?
Je suis issue d’une famille à la fois composée d’artistes, mais aussi d’ingénieurs. Cela se traduit par une mère peintre et un père dans le milieu musical, tous deux sensibles au beau et à tous les courants artistiques. A cela s’ajoute un grand-père ingénieur des Ponts et Chaussée qui m’a transmis l’habitude des plans et de leur lecture. C’est cet environnement complémentaire qui m’a conduit vers la conception et le design d’espaces, puis vers une formation d’architecte.
Pourquoi l’architecture médico-sociale ?
J’ai été formée à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris la Villette, qui avait, historiquement, une dimension très sociale. C’est là que j’ai découvert cette spécificité appliqué à l’architecture, sans avoir encore la moindre idée de la multiplicité des projets de ce secteur ! Pendant mes études, je me suis ainsi formée aux logements sociaux et à la réalisation d’écoles. Puis, mon diplôme en poche, j’ai intégré d’emblée l’agence Mengeot et Associés à Boulogne, pour accéder pleinement au secteur médico-social, et, à celui des personnes handicapées. A l’agence , j’ai d’ailleurs découvert les ESAT et le fait que les personnes en situation de handicap pouvaient travailler. J’ai aussi découvert les différents types de structures d’accueil pour personnes âgées et/ou handicapées. Toute une tranche de la population sur laquelle j’ai porté un nouveau regard.
Quels sont les aspects de ce secteur qui vous ont le plus attiré ?
C’est au contact des résidents et des Maitre d’Ouvrage du domaine que j’ai développé mon goût et ma sensibilité pour le médico social et je suis fière de travailler pour eux. On peut même aujourd’hui parler de vocation. Il n’y a pas de filtre avec des personnes en situation de handicap. On sait tout de suite si elles sont satisfaites ou pas, et, j’aime ce côté vrai. J’aime voir comment elles aménagent les lieux et y vivent. C’est aussi une part de la population un peu mise de côté mais qui est pleine de ressources et de bienveillance !
Et aujourd’hui quels sont ceux qui vous passionnent ?
Le fait que ce soit un métier très large et très complet, partir de rien et concevoir un projet dans son entité, de la page blanche à l’emménagement des résidents. La conception, les plans mais tous les à-côtés aussi comme le relationnel, les mairies, l’administratif… C’est à la fois créatif et technique. Un jour vous êtes dehors en bottes et casque de chantier pour une réunion en province, et le lendemain en tailleur en rendez-vous dans des bureaux au cœur de Paris. Il n’y a pas une journée qui se ressemble.
Qu’avez-vous découvert d’autre ?
J’ai découvert qu’un projet change plusieurs fois de visage et qu’il ne faut pas s’attacher aux choses que l’on conçoit, car c’est en les modifiant qu’on les améliore. C’est un véritable travail d’équipe. J’apprécie aussi beaucoup la phase très enrichissante de conception en équipe où chacun apporte sa « pierre à l’édifice »! Elles m’ont vraiment permis de progresser dans mes acquis de connaissance et manière de concevoir. C’est une vraie chance pour moi d’avoir pu travailler dès le début aux côtés de Jean-Philippe Mengeot, riche de son expérience dans le domaine médico-social, et qui la partage à tous les membres de notre équipe.
Mais encore ?
Certains éléments de mon métier qui me paraissent rébarbatifs au début et qui sont essentiels à tout projet. Les OPR par exemple, Opérations Préalables à la Réception. Une visite en fin de chantier qui a pour but de relever pièce par pièce toutes les petites anomalies à reprendre avant la livraison du bâtiment. Très minutieuse, cette action permet de comprendre, d’apprendre le vocabulaire et de connaître le rôle de chaque corps de métier. C’est une des premières missions que l’on m’a confiée en arrivant chez Mengeot et associés ; J’ai commencé par la fin, mais cela permet de remonter le fil du chantier, jusqu’à l’origine.
Quels sont les aspects qui vous ont le plus attirée ?
J’étais fascinée par le fait qu’un projet commence par un coup de crayon pour finir par une réalisation concrète. L’idée abstraite dans sa tête, qui donne lieu a des plans, qui passe chez les ingénieurs, puis à l’urbanisme etc. et qui, au final donne un bâtiment dans lequel on vit, travaille ou autre. Et l’empreinte laissé par l’architecture que ça soit dans le cœur des gens où dans le paysage de la ville est quelque chose qui fait de notre métier une responsabilité.
Quels sont les aspects du métier d’architecte qui vous passionnent ?
La nouveauté. Qui dit pathologie, dit thérapie et par conséquent amélioration continue. Le fait de travailler pour des personnes handicapées, donne lieu à de nouvelles thérapies que l’on doit intégrer dans nos conceptions.
Avez-vous un exemple ?
Nous avons récemment travaillé sur un établissement d’accueil pour enfants souffrant de Troubles du Spectre Autistique. Cette population, ultra sensible, a besoin d’espaces « refuge ». On a créé, à proximité des espaces de vie, de toutes petites pièces qui s’appellent « salle d’apaisement ». Ce local est indispensable pour pouvoir isoler un enfant en crise afin qu’il y retrouve le calme et donc un état détendu.
Votre plus grande émotion en architecture ?
Ma plus grande émotion, une claque architecturale lorsque je suis rentrée dans la partie haute de la Sainte Chapelle à Paris. Une architecture ultra classique qui à l’étage, révèle des vitraux aux multiples couleurs et une lumière extraordinaire. C’est à ce moment que j’ai réalisé à quel point l’architecture avait un effet très important sur nos émotions.
Comment vous définissez-vous ?
Je dirais que nous sommes des concepteurs d’espaces.
Comment abordez-vous un nouveau projet ?
Le stress et l’angoisse de la page blanche passés, on est vite pris dans l’action. Et puis nous sommes guidés dans nos choix par le programme, le contexte et le respect du cahier des charges. Je commence par m’organiser puis je hiérarchise les choses. C’est un travail qui se fait étape par étape, et, toujours en lien avec le client, le bureau d’études, les administrations et les différentes équipes.
Et humainement ?
Le fait de faire du médico social, implique de travailler pour les gens. Cela donne une dimension plus riche.
Un projet que vous souhaitez évoquer ?
Oui, Santeny pour lequel nous avons tout mené : étude, permis,… Aujourd’hui nous en sommes à la phase chantier extension, précédée par une phase de construction qui a duré 2ans. C’est une longue naissance, un projet sur la durée, mais enrichissant à tous points de vue.
Et en termes d’amélioration continue ?
Oui, l’EHPAD de Champagnole (photo ci-dessous) dans le Jura. Il s’agit d’un projet biosourcé aux normes très poussées comme le BEPOS (Bâtiment à Energie Positive). Pour cet établissement, l’idée est de réaliser une synergie pour que le bâti final soit à la fois esthétique tout en répondant à ces exigences environnementales. Transformer la contrainte en un terrain de jeu !